aNTiGoNe Joue
aVeC LeS MoTS MaQuiS
© été 2020
SHaNDyNaMiQueS
Le JouRNaL Du BRiSe LaMeS
VeRSioN aNTiGoNe & STéPHaNe
© été 2020
SHaNDyNaMiQueS
Étant donnés :
1°) la situation Covid que nous savons,
2°) le monde d'après qui pose question,
je m'étais dit que si je voulais y voir assez clair
pour pouvoir en parler clairement, le plus simple,
c'était de retrouver Antigone et d'en parler avec elle,
sachant qu'elle avait connu pire.
La question était donc la suivante :
Où trouver Antigone aujourd'hui ?
Oedipe, son père, que j'avais croisé
en quittant le canapé de mon psy, m'avait dit que je pourrais
la trouver à Montpellier, quelque part dans le quartier post-moderne signé par l'architecte catalan Ricardo Bofill, quartier auquel on avait d'ailleurs doné son nom : Antigone...
Sophocle, Euripide, Eschyle, Lacoue-Labarthe, Sorj Chalandon,
celles et ceux qui à ce jour avaient écrit sur elle, et que j'avais évidemment consultés, pensaient tout comme Oedipe qu'elle devait habiter là,
qu'elle devait même s'y sentir comme chez elle. Celles et ceux
qui avaient déjà eu à ce jour l'occasion de la filmer
ou de la mettre en scène, les Tzavellas, Cavani, Straub & Huillet,
que j'avais également consultés, avaient abondé dans le même sens.
Karine Saporta elle-même, qui avait signé une choré intitulée
Sophoclea, m'avait dit qu'il y avait minimum une chance
de la trouver là. Ne serait-ce qu'à la médiathèque du coin...
Bref ! Je pensais que trouver Antigone à Montpellier serait
un jeu d'enfants. J'avais d'ailleurs obtenu l'aide de tout une bande
de garnements pour coller mes affiches Urgent : Cherche Antigone
ici et maintenant... J'avais attendu les appels trois jours durant. Rien.
Zéro retour. Bizarre. Je trouvais ça bizarre.
Autour de minuit, le troisième jour, alors que je commençais
à trouver le temps long, j'ai finalement reçu un email de Juliette Mézenc...
Écrivaine, Juliette a rejoint le maquis cévenol des mots, des mots sapiens,
des mots bleus et des mots de passe ascendant passe partout.
Maquisarde, elle résiste depuis des tas de paquets de temps à ce,
celles et ceux, trop nombreux à son goût, qui ont choisi de garder
le silence face à un opéra mundi qui va droit dans le mur.
Juliette alias Antigone était prête à me parler
dans sa langue, celle des mots maquis...
Antigone, alias Juliette Mézenc, et Hémon, alias Stéphene Gantelet,
se sont rencontrés à l'école supérieure de commerce de Chambéry.
Mais le commerce, ce n'était pas vraiment leur truc.
Juliette a donc choisi d'enseigner la littérature,
avant de passer de la lecture presqu'à plein temps
à l'écriture de ses premiers textes : Sujets sensibles, en 2009 ; Poreuse,
en 2012 ; Elles en chambre, en 2014 ; Laisser-passer, en 2016
Stéphane, de son côté, a bifurqué vers la sculpture.
Après une dizaine d'années comme fondeur
et une première série de productions en bronze,
à partir de 200(, il s'est de plus en plus intéressé au volume vituel.
Les concepts de modélisation et d'iages de synthèse des logiciels qu'il utilise
sont rapidement devenus les sources de son inspiration. En même temps
qu'il réalise des vidéos d'animation et des volumes, par pliages de papiers
ou par impression 3D, il s'intéresse maintenant à la programmation,
au fameux code, aux algorithmes et aux humanités dites digitales,
dans le cadre d'une étonnante coopération avec sa compagne,
l'écrivaine Juliette Mézenc.
Ensemble, ils ont ainsi conçu et construit en 3D
un drôle de jeu vidéo littéraire : Le journal du brise lames.
Un game de ouf qui fut l'une des pièces phares du festival EXTRA !
en septembre 2020 au Centre Georges Pompidou, à Beaubourg, à Paris.
"Personne n'a encorevu ça, s'enthousiasme Juliette Mézenc,
auteure du Journal du brise lames, version bouquin.
Qu'il existe des livres adaptés par la suite en jeux vidéo industriels,
c'est entendu, c'est monnaie courante. Mais qu'un livre de littérature
contemporaine, explorant déjà en son sein tous les genres possibles
— le récit, le roman, la poésie, l'essai, le théâtre... — se décline dans sa conception même en jeu vidéo littéraire, c'est inédit. C'est le moment.
C'est ça, les délices de la création indé. C'est ça, Le journal du brise lames.
Dans le livre, le brise lames est source de langage et il s'exprime
en son nom propre. Il vibre des récits qui le traversent, il abrite
des personnages en mouvement ou en fuite, il il fixe et il éprouve
le temps qui passe et dont lui seul, dans son inertie, est capable
de saisir la fluidité et l'envergure. Dans le jeu vidéo créé en parallèle
de l'écriture même du texte, le brise lames est un monde en tant que tel.
On peut en explorer les tréfonds, remuer ses textures, jouer avec ses ramifications procédurales, découvrir son héroïne mutante. À la manière
des grands classiques de nos jeux d'enfance. Il est à concevoir comme
une série de niveaux pour prendre progressivement la dimension du lieu..."